Enoncé du problème
La survenue d’un accident du travail,
surtout s’il est grave, peut entraîner chez la victime des
désordres psychologiques, qui ne sont pas souvent pris en compte par
les médecins conseils et les experts.
La victime est en droit de revendiquer une juste réparation des préjudices qu’elle a subis, mais sa quête peut être dévalorisée par les médecins conseils et les experts qui parlent alors de « sinistrose ».
Le terme « sinistrose » a été créé par un certain BRISSAUD en 1908, en contre-feu de la loi de réparation des accidents du travail de 1896, qui en effrayait plus d’un à l’époque.
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Exposé des faits
En fait, c’est plus grave (arrachement
d’une partie du muscle cubital antérieur, épicondylite sévère).
Monsieur L. bénéficie de deux interventions chirurgicales. Le taux est
revu à la hausse : 16 %, dont 2 % en coefficient pour
déclassement professionnel (la victime est licenciée).
Monsieur L. conteste au TCI car le
handicap est important : diminution de la mobilité du membre
supérieur droit, douleurs intenses.
Le taux revendiqué est de 30 %, se décomposant comme suit : 8 % pour le déficit au niveau de la main, 12 % pour le déficit du coude, du poignet et de la pronosupination et 10 % pour les phénomènes douloureux.
Le TCI diligente une expertise. L’expert tout en estimant que le handicap vaut 35 %, propose de maintenir le taux à 16 %. Il donne comme raison qu’il existe une discordance entre les « signes objectifs » et l’exclusion douloureuse du membre supérieur droit que présente la victime et parle alors de « sinistrose caricaturale ».
Nous faisons remarquer au tribunal qu’à une époque où l’aspect psychologique des traumatismes est prise en compte à part entière, ce terme apparaît comme déplacé , vestige d’une approche médicale mécaniciste de l’être humain.
Sans nier qu’il existe une participation psychologique dans les séquelles présentées par la victime, on rappelle que ce phénomène est maintenant admis par tous, variante d’une névrose post-traumatique et que cet aspect mental du handicap doit être totalement pris en compte dans la fixation du taux d’IPP.
Le TCI ne prend pas en compte nos observations et confirme le taux d’IPP de 16 %. Monsieur L. fait appel devant la CNITAAT. L’expert diligenté par cette dernière propose un taux de 28 %, dont 2 % pour le coefficient professionnel.
Nous avons alors toute raison d’être satisfaits, d’autant que la clôture de l’instruction est prononcée et que la date de l’audience est fixée.
Mais c’était trop beau et survient un coup de théâtre. Pour des raisons de débat contradictoire qui ne se serait pas effectué normalement, l’ordonnance de clôture est révoquée et les débats sont réouverts.
En principe, le dossier devait être renvoyé chez l’expert qui avait donné un avis favorable, mais curieusement c’est un autre expert qui intervient. Il reprend à son compte le concept de sinistrose et propose de s’en tenir au taux d’IPP de 16 % attribué par le TCI.
Nous répondons bien sûr à cet expert et les juges décident alors de soumettre le dossier à un troisième expert. Mais hélas, cet expert, pneumologue (!), est aussi tendancieux que le deuxième et « massacre » la victime en proposant également le taux d’IPP de 16 %. La Cour, tout en notant scrupuleusement les points de vue des parties, se range à l’avis des deux derniers experts.
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Discussion
Le résultat est que pour une fois,
parmi les nombreux recours faits devant la CNITAAT, où un expert de
cette dernière nous donnait raison, on a assisté à un dérapage
préjudiciable à la victime et on serait tenté d’y voir une
manœuvre.
Les deux derniers experts qui sont
intervenus sont connus pour être des « tueurs » dont
l’objectif principal et constant est de ramener au plus bas les
taux d’IPP que les victimes sont en droit de bénéficier.
Les juges ne brillent pas par leur
audace en ne remettant pratiquement jamais en cause les avis de leurs
experts, alors que régulièrement nous versons au débat des
éléments d’analyse prouvant que les arguments qu’avancent les
experts sont mensongers.
Nous n’avons pratiquement jamais eu
gain de cause lorsque nous avons contesté à la CNITAAT une décision
du TCI. Mais nous continuons de contester quand nous l’estimons
nécessaire, sans nous faire d’illusion, dans l’attente que le
scandale éclate au grand jour, tout en accumulant des preuves de
cette situation déplorable.
Je ne suis sans doute pas un bon
évaluateur du dommage corporel (!), mais ces dernières
années la situation est devenue encore plus catastrophique depuis
que les caisses contestent systématiquement les décisions
favorables aux victimes rendues par les TCI.
Il nous semblait
qu’en matière de justice, les principes fondamentaux étaient
l’individualisation et la personnalisation des litiges.
Les caisses auraient tort de se priver
de contester à la CNITAAT, puisque la plupart du temps les taux
obtenus au TCI sont ramenés au niveau fixé par le médecin conseil,
dans une sorte de connivence entre médecins conseils et experts de
la CNITAAT, avec des juges jouant les Ponce Pilate.
On attend avec impatience que le Ministère
de la justice aille fourrer son nez dans ce « sac de nœuds » et prenne les mesures nécessaires pour que la situation change.
Décembre 2014
Bonjour, J'ai eu un accident de voiture en allant au travail en 2001. J'ai eu une première consolidation avec 19,5 % d'IPP (donné par la CPAM) que j'ai contesté au TCI qui a alors réévalué mon taux à 48%. Puis j'ai eu une rechute avec une consolidation avec un taux d'IPP de 50% donné par la CPAM. J'ai contesté ce taux et en 2014 le TCI m'a donné 62% incluant des taux donnés par le TCI la première fois (en 2011) + des taux de lésions non prises en compte par la CPAM + un coefficient professionnel de 2% qui lui me semble trop insuffisant. Je souhaiterais contester auprès de la CNITAAT mon taux professionnel de 2% (je ne souhaite pas contester les taux concernant mes lésions) mais il paraît que mon dossier serait vu par le médecin expert de la CNITAAT qui regarderait mon dossier médical dans son ensemble et pas seulement le taux professionnel et alors, il paraît que le médecin expert pourrait ensuite réévaluer tous mes taux et pas seulement le taux professionnel qui pourtant est le seul objet de ma contestation! En lisant votre document, je ne sais plus s'il vaut mieux garder mes 62% plutôt que de contester mon taux professionnel et voir alors malheureusement mon taux global descendre. Que faire? Merci pour vos conseils.
RépondreSupprimerEn principe, si vous contestez à la CNITAAT le taux attribué par le TCI, celle-ci ne revoit pas le taux à la baisse.
RépondreSupprimerDe mon expérience (plusieurs centaines de dossiers) toutes les contestations de taux d'IPP attribués par le TCI n'ont jamais abouti à la CNITAAT (mais je persiste quand même dans l'espoir qu'un jour le scandale va éclater et que les pratiques de la CNITAAT changeront), mais je n'ai pas d'exemple où la CNITAAT a revu à la baisse le taux attribué par le TCI.
Cela dit, vous courrez effectivement le risque que le taux médical fasse l'objet d'une analyse par un médecin expert de la CNITAAT.
Mais de toute façon vous avez très peu de chance que le taux professionnel soit revu à la hausse. Je suis tenté de vous conseiller de ne pas contester
Destin 1
RépondreSupprimerBonjour
Suite a une contestation devant le tci du taux d'ipp de 12% alloué par le médecin conseil de la cpam,le médecin expert désigné par le tci augmente ce taux a 50%.La cpam a fait appel. Après étude du dossier la cnitat désigne UN expert pour avis qui confirme le taux de 50% a votre avis quel est l'aboutissement de cette affaire
car on en peu plus cette affaire dure depuis 2009.
DEPUIS L'ACCIDENT DE PAPA ON VIT SOUS LE SEUIL DE PAUVRETÉ. MERCI DE VOTRE REPONSE
En principe la CNITAAT suivra son expert, sauf imprévu, et le taux d'IPP de 50 % sera homologué.
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